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Le voyage de Gulliver

© Photo Y.P. -

© Photo Y.P. -

Mon pays, ce n’est pas un pays, Gulliver !

Eux deux, je les aime ! Vraiment !

Les fidèles lecteurs de ce site le savent bien : je suis un fan inconditionnel du travail de Valérie Lesort, celle qui toute petite voulait fabriquer des monstres, et de Christian Hecq.

Une nouvelle fois, ces deux-là, ces deux fous-poètes merveilleux nous proposent un spectacle à nul autre pareil, une heure et demie de grâce, de poésie, de créativité, d’extraordinaire inventivité et d’humour ravageur.

Et de technique aussi.

En l’occurrence, celle du théâtre noir, inventé et théorisé par le belge (encore un !…) Alfred de Saint-Gennois (1857-1939), alias le Professeur Dicksonn, qui le premier eut l’idée d’adapter le tour de la boîte noire des prestidigitateurs à l’échelle d’une scène, en l’occurrence celle du théâtre Robert-Houdin.

C’est grâce à ce « tunnel noir » savamment éclairé (ou pas) qu’il est possible pour Melle Lesort et M. Hecq de nous montrer des personnages hybrides de 50 cm de hauteur (bien pratique pour des Lilliputiens), ou encore de permettre à des objets ou à des oiseaux de voler.

C’est avec cette technique qu’ils avaient déjà ravi le public de la Comédie Française avec leur version de 20000 lieues sous les mers, et surtout celui de l’Opéra Comique avec le délicieux spectacle Petite Balade aux enfers ou encore, toujours à l’Opéra Comique, Le cabaret horrifique.

Ici, à l’Athénée, Valérie Lesort a adapté le premier voyage de Gulliver.

Elle en a fait un savoureux et irrésistible moment qui prend la forme d’un épisode du Muppet-Show, cette émission qui constitue pour elle une inépuisable source d’inspiration.

Un invité humain dans un monde de marionnettes.

Cet invité c’est Gulliver, interprété par Renan Carteaux, qui sera également le narrateur.

Il a d’ailleurs le pouvoir de figer l’action, afin de faire avancer le discours narratif.

Les lilliputiens seront donc des êtres faits de la tête des comédiens et le corps de poupées animées.

© Fabrice Robin

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Immédiatement, le public est conquis. Ce décalage d’échelle et cette disproportion corporelle sont les vecteurs des premiers rires dans la salle.

De savants maquillages, les petits costumes toujours aussi réussis de Vanessa Sannino (celui très sexy de la reine Cachaça est épatant… Je n’en dis pas plus…), tout ceci concourt à la poésie et au merveilleux.

Christian Hecq, artiste protéiforme, formé également à l’école du mime et du cirque, a une nouvelle fois su parfaitement faire bouger ces marionnettes-hybrides.

Ici, les gestes, les déplacements sont poussés à leur paroxysme, à leur état optimal.

Il y a quelque chose des grands artistes burlesques, dans cette façon de pousser chaque mouvement jusqu’au maximum.

Cette « optimisation » du geste et du déplacement provoque bien des rires dans la salle.

C’est ainsi que de très grands moments nous attendent, au royaume de Lilliput, dont les fils sont bien connus. (J’ai bien retenu l’insulte, Melle Lesort ! )

Un conseil de famille royale impitoyable, un banquet plantureux (et moi de me remémorer une nouvelle fois la formidable scène de la pomme, à l’Opéra Comique, dans le Domino Noir), une furieuse bataille navale au cours de laquelle les boulets pleuvent !), ou encore un incendie propice (sans jeu de mots…) à la disgrâce du héros, toutes ces scènes nous font beaucoup rire !

Il y a quelque chose de l’enfance dans tout ça. Une enfance qui ne se censure pas.

Les deux metteurs en scène nous proposent un monde où tout est possible, où il n’y a qu’à exercer son imagination pour enclencher telle ou telle situation : « on dirait qu’on ferait ceci », « on n’aurait qu’à dire que je suis untel »…)

Bien entendu, une autre réussite de l’entreprise est de proposer un spectacle à multiples lectures.
Il y a le conte pour les petits, mais il y a surtout cette histoire humaniste et philosophique écrite par Jonathan Swift, dans laquelle, sont évoqués le respect de l’autre, l’acceptation de la différence, le libre-arbitre de chacun ou encore la capacité de se faire entendre et d’avancer ses propres arguments.

Ce spectacle est également une comédie musicale, avec des chansons très réussies et des chorégraphies des marionnettes très abouties.

Et nous dans la salle d’avoir nous aussi envie de bouger en rythme avec elles.

Un coup de chapeau aux deux compositeurs Mich Ochowiak et Dominique Bataille !

© Fabrice Robin

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Et puis la toute dernière scène ! La toute dernière image apparaissant dans un nuage de fumée !

Y aura-t-il une suite, un deuxième voyage de Gulliver ?

Une nouvelle fois, nous ressortons d’un spectacle de Valérie Lesort et Christian Hecq complètement subjugués.

Les deux artistes n’en finissent plus de nous plonger dans le monde du merveilleux.

Un monde à la fois poétique et débridé.

C’est drôle, c’est intelligent, c’est brillant !

Courrez toutes affaires cessantes à l’Athénée. Ce spectacle est un incontournable de cet hiver !

Ce ne sont pas les élèves de 5ème C du collège Sainte-Geneviève dans le 6ème arrondissement qui vous diront le contraire, eux qui comme moi ont passé une formidable et inoubliable soirée.

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