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Immanuel Wilkins en concert au Nice Jazz Festival

© Photo Y.P. -

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En ouvrant la deuxième journée du Nice festival Jazz, le jeune saxophoniste alto originaire de Pennsylvanie Immanuel Wilkins a fait une très forte impression.

Immanuel wilkins, installé à New-York en 2015, pour suivre les cours de la prestigieuse Juilliard School, là-même où il rencontrera le trompettiste et compositeur Ambrose Akinmusire, qui lui sert de mentor et lui met le pied à l’étrier.

Le public du Théâtre de verdure a beaucoup apprécié le dernier projet en date de ce compositeur particulièrement inspiré.
Il s’agissait pour lui de jouer sur scène l’intégralité de son deuxième album,
The 7th hand, un album qu’il définit lui même comme « une suite composée comme une pièce préparatoire pour un quatuor qui deviendrait pleinement un vaisseau à la fin de cette pièce. »

Un quatuor donc qui tout au long de cette heure de concert sera particulièrement homogène, cohérent et soudé.
Mister Wilkins joue pour cette tournée européenne avec trois musiciens réputés chacun dans leur domaine : au piano, Micah Thomas, à la contrebasse Matt Brewer et à la batterie Kweku Sumbry.

Les sept tires de l’album, enchaînés, vont constituer la set-list de ce soir.

Tout commence avec Emanation.
Immédiatement nous comprenons.
Immanuel Wilkins est un virtuose de son instrument, avec une technique époustouflante, toujours au service d’un propos musical, sans jamais tomber dans une gratuité de mauvais aloi, qui nuirait à la qualité du discours.
Un premier moment très hard bop, avec une impressionnante propension à jouer vite et bien. Les volutes, les envolées de notes bleues surprennent un peu certains, mais le public savoure très vite cette ouverture, immédiatement suivie par un premier thème.

Une sorte de plainte composée d’une cellule harmonique et mélodique assez courte, avec trois notes répétitives.
Cette plainte sera déclinée dans tous les registres, et notamment dans les aigus. On pense alors à des cris.
Une émanation d’une présence hors la scène, finalement. Le premier titre est très bien choisi.

Micah Thomas / © photo Y.P. -

Micah Thomas / © photo Y.P. -

Puis vient un morceau un peu chaloupé, avec le premier solo de piano de Micah Thomas, qui assurément a étudié Stravinsky.
Lui aussi est un grand virtuose, avec une main gauche sidérante qui est véritablement partie prenante du développement de ce solo.
Il sera lui aussi très applaudi.

Il faut noter que très humble, Immanuel Wilkins se mettra en retrait lorsque chaque musicien jouera seul. C’est un signe qui ne trompe pas...

Un morceau chaloupé, donc, sur une mesure à 3 temps, avec un thème doublé note pour note à la contrebasse. Tout ceci est très délicat, comme une dentelle musicale.
Beaucoup de plénitude, de sérénité se dégage de ce qui nous est donné d’entendre.
En jouant, Mister Wilkins ferme ses yeux, derrière ses grosses lunettes noires.

Le titre suivant est encore une fois enchaîné, un temps supplémentaire se rajoute à la mesure.
Une ballade transmodale, au cours de laquelle Matt Brewer prend son solo en chantant les notes qu’il joue sur ses quatre cordes.

Le batteur Kweku Sumbry en profite pour glisser tout un passage remarquable de technique, tout en délicatesse et en finesse, au cours duquel il mouille son doigt de salive pour réaliser de longs glissandi sur ses toms.
Repris par de puissants micros, l’effet est remarquable.

Le quatuor-vaisseau vogue ensuite sur un océan calme de notes plus ou moins bleues. C’est magnifique de lyrisme et de beauté musicale.

Un hard-bop intense, très contemporain, à la Steve Coleman va suivre.
A une vitesse hallucinante, Immanuel Wilkins nous emmène cette fois-ci sur une mer déchaînée, par gros temps.
Jamais ennuyeux ou ennuyant, il sait renouveler en permanence ses lignes ascendantes et descendantes de notes, grâce une nouvelle fois à une technique brillante et hallucinante.

Micah Thomas puis Matt Brewer laissent leurs deux compères, la batterie et le sax se retrouvent seuls.
Un époustouflant solo aux drums sidère tout le public ! Quelle technique, Mister Sumbry !

Et puis tout ce petit monde se rejoint pour un final intense, mouvementé, comme une véritable libération d’énergie, pour un vaisseau qui arrive à bon port toutes voiles dehors.

Immanuel Wilkins se retrouve dans les hyper-aigus, son instrument pousse des cris déchirants.
Nous retenons tous notre souffle.
Les dernières notes s’envolent dans le ciel du théâtre de verdure, immédiatement suivies par une impressionnante ovation.

Tous ici avons le sentiment d’avoir assisté à un important moment musical.
Le jazz d’Immanuel Wilkins est intègre, sans concession ni compromission.
Un jazz contemporain nourri de multiples influences, et où l’on sent en permanence l’importance des grands aînés et surtout la puissance mélodique et harmonique de remarquables compositions personnelles.

Si ce grand saxophoniste passe près de chez vous, ne manquez surtout pas son concert. L’un de ceux qui restent longtemps en mémoire.

Matt Brewer / © photo Y.P. -

Matt Brewer / © photo Y.P. -

Kweku Sumbry / © photo Y.P. -

Kweku Sumbry / © photo Y.P. -

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