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La périchole

© Photo Y.P. -

© Photo Y.P. -

Cette Périchole féérique, grandiose et magnifique, c’est vraiment le Pérou !

De la même façon qu’elle co-signe en ce moment un Bourgeois gentilhomme qui restera dans l’histoire de la Comédie française, seule cette fois-ci aux manettes, Valérie Lesort nous propose sa vision enchanteresse de l’un des chefs d’œuvre d’Offenbach, une vision qui restera sans nul doute dans les annales de l’Opéra-comique.

Ou comment laisser une marque indélébile dans la longue liste des mises en scène de cet opéra bouffe créé le 6 octobre 1868 au Théâtre des Variétés.

Jacques et le temple du soleil, ou Offenbach chez les Picaros.
Je dirai même plus : Jacques et le temple du soleil, ou Offenbach chez les Picaros !

C’est en effet du côté de Messieurs Hergé et Tintin que Mademoiselle Lesort semble bien avoir cherché et trouvé les références culturelles de son travail salle Favart.
D’ailleurs, un petit détail savoureux ne nous échappera pas : deux personnages tout droits sortis de Moulinsart feront leur apparition sur le plateau.

Cette mise en scène, ce sera une magnifique bande dessinée colorée, animée, une succession de tableaux époustouflants, tous plus réussis les uns que les autres, générant un humour ravageur et une douce folie maîtrisée de bout en bout, et faisant appel à notre capacité à nous rappeler notre enfance.

 

Le monde de l’enfance.
Une nouvelle fois, c’est à ce monde-là que fait appel Valérie Lesort.

Un monde où l’on en finit pas de dire « On dirait qu’on ferait ci, on aurait qu’à dire qu’on serait ça... »

En témoigne encore et toujours le style « lesortien », qui fait appel à une foultitude de délicieux petits procédés dramaturgiques qui nous renvoient à nos plus jeunes années.

Des pains au raisin qui évoquent les macarons capillaires de la princesse Leïa, des chevaux qui forcément laissent du crottin, des chiens qui évidemment conduisent des petites autos à pédales, un prisonnier amoureux qui dessine comme de bien entendu deux initiales dans un grand cœur, et tant d’autres...

Et puis les marionnettes, sans qui un spectacle de Valérie Lesort ne serait pas un spectacle de Valérie Lesort.

Les marionnettes épatantes de Carole Allemand, qui nous touchent profondément, parce qu’elles nous font remonter à l’époque plus ou moins lointaine de nos propres doudous et autres nin-nins…

Les magnifiques et toujours aussi inventifs costumes de Vanessa Sannino, la scénographie de Audrey Vuong, à base de deux grandes structures verticales qui pivotent sur elles-même (avec également un cachot très réussi), les tableaux dansés chorégraphiés par Yohann Têté (avec un french cancan à la fois endiablé et décalé), tout ceci concourt également à notre émerveillement de tous les instants.

 

Et la distribution !
Une distribution trois étoiles et bien plus, qui va elle aussi provoquer l’enthousiasme des spectateurs.

Valérie Lesort a énormément demandé aux chanteurs, avec une direction d’acteurs à la fois très précise et exigeante au possible.
Ces chanteurs, dont elle a su utiliser au mieux les talents lyriques, certes, mais également leur capacité à jouer la comédie, ces chanteurs vont être amenés à s’exprimer dans des positions étonnantes et parfois stupéfiantes, ce qui aura pour effet là encore de nous faire beaucoup rire.
Le clin d’œil chorégraphique de Piquillo à Michaël Jackson est formidable ! Ou comment chanter penché à 45° )

Stéphanie d’Oustrac est une grande, très grande Périchole, dont on se souviendra longtemps.
La mezzo-soprano nous emmène loin, très loin, avec à la fois une délicatesse et une puissance vocales qui conviennent tout à fait au personnage. Quel engagement, quelle fougue !

Elle nous captive en permanence, et nous attendons avec impatience les airs très connus du personnage.

Le ténor Philippe Talbot interprète de façon irréprochable Piquillo, formant avec Mademoiselle d’Oustrac un couple particulièrement cohérent, réaliste, aux passionnantes péripéties.

Ces deux-là vont nous faire beaucoup rire. Leurs scènes de comédie sont en effet drôlissimes.

Le talentueux baryton Tassis Christoyannis est un vice-roi facétieux, libidineux à souhait, finalement magnanime.
Ses airs, son allure épatante très Henri IV, son léger accent grec, tout ceci nous ravit !

Eric Huchet (qui m’a fait penser dans la première partie au sociétaire honoraire du Français Bruno Raffaëlli), ainsi Lionel Peintre incarnent pour notre plus grand plaisir les deux hauts dignitaires péruviens, nous faisant eux aussi beaucoup rire.

Quant à l’habituée de la maison, la toujours délicieuse mezzo Marie Lenormand, elle chante de la plus brillante façon qui soit le double-rôle de Berginella et Frasquinella.

Julie Goussot et Julia Wischniewski, elles aussi irréprochables, sont les deux autres cousines !

Julien Leroy, à la baguette, contribue pleinement avec l’orchestre de chambre de Paris et le chœur Les éléments, à nous plonger dans le tourbillon de cette musique d’Offenbach.
Les musiciens et les choristes nous rappellent parfaitement qu’il ne faut pas se fier à l’impression première de légèreté de cette musique.

En les écoutant tous, on est certes emporté dans un premier temps par une grâce de tous les instants, mais on est aussi frappé par l’exigence que requiert la partition du grand Jacques.

Comment pourrait-il en être autrement, une longue et on ne peut plus sonore ovation conclura cette mémorable soirée durant un très long moment.
Les applaudissement en rythme témoignent du grand plaisir pris par les spectateurs, complètement captivés, émerveillés et conquis par ces presque trois heures de pure beauté.

Des spectateurs qui pourront dire en se souvenant pendant longtemps de cette Périchole d’anthologie : « Nous y étions ! »

Et l’on est prié de ne pas oublier : « Quand lama fâché, señor, lui toujours faire ainsi ! »

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