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Cœur poumon

© Photo Y.P. -

© Photo Y.P. -

Joueurs de blouse,
On est des joueurs de blouse !

Les blouses en questions, ce sont celles, bleues, vertes, des soignants de ce service de réanimation cardiaque pédiatrique.
Comme un uniforme, comme une tenue de travail très particulière, à nulle autre pareille.

Lorsque vous êtes dramaturge et metteure en scène, et lorsque vous vivez cette expérience à jamais traumatisante qui consiste à voir opérer à cœur ouvert votre enfant et voir ainsi sa vie sauvée, nul doute qu’un jour où l’autre, vous ayez envie d’en tirer un spectacle.

C’est le cas de Daniela Labbe Cabrera, qui avec ce Cœur poumon va nous dire, va nous raconter et va nous montrer.
Comme un témoignage, et peut-être comme un besoin de « vider son sac ».

Elle nous propose de nous plonger dans un ce service d’un hôpital public français, avec ses infirmières, ses chirurgiens, ses réanimateurs.
Et un patient. D’une dizaine de jours et qui déjà va devoir subir l’une des plus lourdes opérations qui soient.

Nous pénétrons dans la salle Copi du théâtre de la Tempête, alors que sur le plateau règne une obscurité un peu mystérieuse.
Dans les gradins, déjà installée, une infirmière, charlotte sur la tête, bocal contenant une salade de riz dans les mains.
Ainsi qu’une jeune femme.

Nous n’allons pas tarder à faire sa connaissance.
Mona revient dans cet hôpital, rencontrer six ans après les soignants qui ont sauvé son enfant.
Et nous de revivre les circonstances dramatiques de ce temps « hors du temps » pour cette jeune mère et son conjoint.

Avec une précision digne d’un documentaire, nous allons nous transformer en «petites souris » dans ce service, dans ce bureau des infirmière, dans ce bloc opératoire, dans cette salle de réveil.

Durant cette heure et trois quarts d’heure, il règne en permanence un magnifique sentiment de vérité.
Je crois qu’il est impossible de montrer ce qui nous sera montré et démontré sans avoir vécu ces circonstances extra-ordinaires, au sens étymologique du mot.

La scénographie reprend tous les codes très particuliers de cet univers, avec beaucoup d’accessoires réels, de ceux que l’on peut vraiment trouver dans de telles circonstances.
Une couveuse avec quantité de tuyaux perfusant un bébé au milieu d’une chambre stérile (bon, je ne suis pas certain qu’on puisse y introduire un doudou en peluche, mais bon…), des meubles et quantité de matériels médicaux.

Nous allons savoir tout ce qui s’est passé, comment ça s’est passé, comment ces moments dramatiques ont été vécus non seulement par la famille (couple et grand-mère), mais également par les soignants.
Le désespoir, la souffrance, l’inquiétude, la peur de l’inéluctable, le sentiment d’oppression permanente, et tous les sentiments que d’excellents comédiens nous mettent en évidence.

Ici, il est question de précision chirurgicale, si j’ose m’exprimer ainsi.
Au risque de me répéter, nous sommes en permanence confrontés à une formidable impression de vérité, non pas comme dans ces séries à romancées comme « Urgences », ou « Dr House », mais presque comme dans un docu-fiction du meilleur aloi.
Un médecin a d’ailleurs collaboré à la réalisation de ce spectacle.

Cette entreprise artistique est de celles qui s’écoutent, avec les cliquetis caractéristiques des respirateurs artificiels et autres machines étranges et compliquées, les bips des moniteurs électroniques, et avec également de la musique, qui accompagne les gestes chirurgicaux.
Le professeur du service est un mélomane, et ceci n’est pas un hasard.

Avec au passage un clin d’œil sociétal et politique quant à la déliquescence de notre hôpital public : fermetures de lits, manque de matériel, au point où les charlottes aseptisées des visiteurs sont remplacées par des sacs plastique de supermarché !
Si si, ça aussi, c’est du vécu.

Il fait noter également de belles créations vidéo, qui sonnent comme des odes à la vie, celle que l’on passe hors des murs bleus des bâtiments médicaux.

Un spectacle intense, fort, qui nous dit le monde, qui nous tend un miroir : comment réagirions-nous, ou comment aurions-nous réagi, nous autres, confrontés à de tels dramatiques moments de vie.
Et peut-être de mort...

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