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Je ne cours pas, je vole

© Photo Y.P. -

© Photo Y.P. -

Va, cours, vole et ne nous venge pas !
Parce que l’essentiel, c’est de participer…

Enfin… Participer, oui, c’est bien, mais quand vous êtes sportif de haut, très haut niveau, gagner, c’est quand même pas mal...

Je dois vous avouer que jusqu’à ce jeudi 8 décembre, la vie et l’œuvre de ces sportifs de haut niveau ne me passionnait guère et ne me procurait que très très peu d’émotions.

Ca, c’était avant la nouvelle pièce d’Elodie Menant.
Et je ne dis pas cela parce que l’un de ses personnages est un journaliste se prénommant Yves et dont la dernière lettre du nom est un « y ».

Mademoiselle Menant que l’on ne présente plus sur ce site a réussi la gageure de me passionner avec un sujet qui m’est très éloigné.
Le sport et ces athlètes qui poussent très loin le sacrifice, pour réussir, pour se dépasser, pour gagner.

Au fond, si cette pièce parle même à celui qui ne regarde jamais une compétition sportive à la télé, c’est bien avant tout parce que les valeurs humaines dont nous parle l’auteure, ces valeurs-là sont universelles et pourraient s’appliquer à tout un chacun.
Gagner, oui, mais en restant intègre, sans se renier. Réussir oui, mais en s’en donnant les moyens, en réalisant d’importants et constants efforts, en sachant rester un être humain digne de ce nom tout en essayant de se surpasser.

Nous voici spectateurs d’une conférence de presse rassemblant du beau monde : Usain Bolt, Rita Plotnikova, Haile Gebreselassie, Rafael Nadal et Laure Manaudou.
Une journaliste de Radio-France, Julie Linard, surgit du fond de la salle et commence à leur poser des questions.

Julie Linard sera le personnage principal de la pièce, un personnage fictif, dont nous allons suivre le parcours, de son enfance minée par l’asthme aux jeux olympiques de Londres, où elle disputera la finale du huit-cents mètres.

Le sport, elle, elle connaît, Elodie Menant. Elle baigne dedans depuis toute petite, de par l’activité professionnelle de ses deux parents. L’asthme aussi, elle sait de quoi il retourne.

Nous allons donc suivre, à coups de flash-backs, d’allers et retours temporels la carrière sportive de cette jeune femme, ainsi que les conséquences pour sa famille de cette vie hors du commun.
Avec des mots justes, sans pathos de mauvais aloi, sans caricature aucune, nous voici embarqués, purement et simplement, dans cette quête de l’or et surtout cette quête de soi.

On ne change pas une équipe qui gagne, même si cette équipe-là travaille énormément.
Johanna Boyé, encore elle, pour la quatrième fois ce trimestre, dont une à la Comédie française, signe une mise en scène très réussie, toujours aussi fluide et aussi précise.
Une mise en scène où règne toujours autant ce sentiment de naturel. Comme une évidence qui pourtant a demandé beaucoup de travail.

Ce sont les corps qui seront mis à l’honneur. Parce que s’il est un domaine où le corps a toute son importance, c’est bien le sport. Le sport et la danse.
Ici, nous assistons à de véritables chorégraphies.
Johan Nus a réglé ces moments formidables dans lesquels le mouvement est décliné sous bien des formes : mouvement ralentis, figés, positions de gymnastique (bravo, Youra Noiret), courses, accélérations (les comédiennes et les comédiens ne ménagent ni leur peine ni leur énergie), pour bouger, les corps bougent.

Et puis la danse.
Vanessa Cailhol, dans ce rôle de Julie Linard, va une nouvelle fois nous ravir de ses multiples talents.
Formée à la très dure école de la comédie musicale, elle est encore et toujours épatante à la fois à jouer la comédie et dans tous ces tableaux dansés, où elle rayonne et illumine le plateau.

La comédienne sera également très émouvante, bouleversante même, lorsque son personnage rencontrera de lourdes difficultés. On entendrait alors une mouche voler dans la salle Jean-Tardieu.

Les autres comédiennes et comédiens interprètent quant à eux plusieurs personnages, souvent hauts en couleurs. (Leurs interprétations de célébrités sont formidables.)
Melle Boyé leur a demandé énormément, que ce soit sur la scène ou en coulisse : les changement de costumes sont réalisés à une vitesse vertigineuse. Je donnerais cher pour voir ce qui se passe derrière le cyclo à paillettes du lointain.

E. Menant, L. Manaudou, même combat ! © Photo Y.P.

La metteure en scène est parvenue à insuffler une dimension quasi-cinématographique dans son travail, sans aucun noir plateau et avec des successions de scènes millimétrées, qui s’enchaînent de façon magistrale.

Aucun temps mort, une pulsation vive de tous les instants, un rythme enlevé, sans oublier des passages traités avec beaucoup de subtile douceur.

Nous allons beaucoup rire, également, grâce notamment à Olivier Dote Doevi et Laurent Paolini qui interprètent deux commentateurs sportifs reprenant tous les tics propres à la profession. Là encore, l’auteure de la pièce sait de quoi elle parle !

Les lumières de Cyril Manetta, la création musicale et sonore de Mehdi Bourayou, les costumes de Vanessa Rebmann, on ne change pas une équipe qui gagne, vous dis-je !

Vous l’aurez compris, je vous conseille vivement ce spectacle où le fond le dispute à la forme en terme de réussite : Elodie Menant nous propose très intelligemment un regard aigu sur le monde sportif.

Vive le sport sur la… au théâtre du Rond-Point !

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