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Sorcière

Stéphan Druet et Macha Méril - © Photo Y.P. -

Stéphan Druet et Macha Méril - © Photo Y.P. -

On les a brûlées...
Parce qu'elles faisaient peur, les sorcières, parce qu'elles étaient trop en phase avec les éléments, trop « connectées » avec les forces de la Nature, dirions-nous de nos jours, parce qu'elles avaient raison, parce qu'elle avaient l'exacte perception des choses. Parce qu'elles savaient.

Mais avant tout parce qu'elles étaient des femmes.

Dans la grande salle du poche-Montparnasse, nous avons rendez-vous avec deux de ces sorcières-là.
Deux sorcières des mots. Une sorcière des mots écrits et oralisés.
Marguerite et Macha.

Melle Méril a beaucoup fréquenté Marguerite Duras.
« Ce que j'aime chez, elle, c'est qu'elle n'a pas honte d'être une femme », écrit la comédienne dans un entretien publié dans le dossier de presse.
Marguerite Duras, celle qui SAIT, disait Lacan.
Marguerite Duras qui a cette conscience d'être femme, et qui nous a laissé cette conscience-là par des écrits et des mots

 

Ce sont justement ces mots qu'a choisi de nous faire partager Macha Méril.
Elle va nous dire un montage de textes, dont certains ont été publiés dans la revue Sorcières, une revue sous-titrée « Les femmes vivent ».

Le noir sur la scène...
On entend le vent, les bruits de la forêt, une chouette qui hulule, comme une plainte qui viendrait de sourdre...
C'est une ombre chinoise qui débute le spectacle. Ainsi qu'une voix qui monte.
Un profil et une voix reconnaissables entre tous.

Ils commencent à dire Duras, ce profil et cette voix.
Et puis, elle apparaît, venant du lointain.
Dans sa seule et longue robe toute simple, comme une chemise de bure écarlate, Melle Méril sembre prête à se rendre au bûcher.
Elle est cette sorcière, qui va nous envoûter de mots, qui va nous fasciner en disant les écrits de l'auteure.

Nous assistons à une leçon d'interprétation.

Durant ces soixantes minutes, il sera impossible de se détacher de la comédienne, ensorcelés que nous sommes par cette parole qu'elle s'est appropriée pour nous la restituer de façon si juste, si engagée, si concernée.

Nous voyons les sampans sur le mékong, nous avons dans la bouche le goût du riz gluant, nous avons mal pour cette femme qui vient de mettre au monde un enfant mort-né, nous rions avec la recette de la soupe de poireaux, à laquelle il faudra trouver un autre nom pour que les enfants puissent avoir envie de la goûter.

Mais surtout, surtout, nous savourons le discours non pas féministe de Duras, mais un discours qui dit « l'appréhension directe du monde qu'ont et qu'ont toujours eue les femmes ».

 

Le metteur en scène, Stéphan Druet, comme à son habitude, utilise très judicieusement l'élément sonore afin de suggérer les lieux évoqués.
Tout ceci est très subtil, avec des ambiances et de belles lumières (coup de chapeau à François Loiseau) qui illustrent parfaitement le propos.


Sans oublier Michel Legrand, dont les extraits d'œuvres collent eux aussi parfaitement aux textes dits.
Des musiques le plus souvent joyeuses, parfois tristes ou plus oniriques, étranges.

Une magnifique valse sera le prétexte à une sorte de sabat dansé.

Sur la scène, il règne une réelle harmonie entre tous ces éléments dramaturgiques, une harmonie qui sert d'écrin aux textes de Marguerite Duras.

On l'aura compris, il faut absolument aller voir Macha Méril.
Une leçon, vous dis-je !

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