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Data, Mossoul

© Photo Y.P. -

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>> année 2025 << >> Dystopie  }
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>> }
> Mila Shegg >> (anagramme) { <<
>> Spécialiste informatique quantique, queen of the qubits ! #SchrödingerCatPowaaaaa !!! {
>> Web ingénieure dans l'immense data center californien GEOLOG >> (anagramme)
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>> << >> << {end « présentation »}


Elle a la mémoire qui flanche, Mila Shegg. Elle ne se souvient plus du tout des années 2014, 2015, 2016.
Qu'a-t-elle fait ? Où était-elle ?
Suite à cet étrange trouble mnésique, va débuter pour elle une quête haletante.

Mila Shegg sent instinctivement que sa place est ailleurs, et qu'une grand part d'elle même lui a été plus ou moins confisqué.


Joséphine Serre, auteure, metteure en scène et par ailleurs l'une des comédiennes de ce Data, Mossoul, a écrit une vertigineuse et profonde réflexion quant à la mémoire et aux traces écrites, enregistrées.


Dans notre rapport de plus en plus envahissant quant à l'utilisation d'Internet, à qui appartiennent-elles ces traces-là ?
Faut-il les garder, les archiver infiniment et comment ? Faut-il les effacer progressivement ?
Qui doit s'occuper de tout ceci, le cas échéant ?
Comment gérer la prolifération des données et la peur de l'oubli propre à l'Homme ? (l'historien médiéviste Patrick Boucheron a posé de manière très pertinente cette interrogation-là.)
Et puis bien entendu, se pose la question de la place et de la puissance de l'Ecriture.


La réflexion de Melle Serre a été nourrie de plusieurs éléments inquiétants.
Et notamment un.


L'énorme projet Internet Archive : en 1996, des ingénieurs du web ont entrepris d'archiver le web mondial. Mais en 2017, dans les premiers mois de l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, le petit groupe d'informaticiens constate avec effarement que des données scientifiques concernant le changement climatique ont été effacées.


Cette démarche d'archivage a de plus résonné en elle avec la volonté quasi-maladive de l'empereur assyrien Assurbanipal, le fondateur durant le VIIème siècle avant J.C. de la première bibliothèque de l'humanité.

Dans sa pièce, elle va donc mixer très habilement le XXIème siècle et l'Antiquité.
Durant deux heures et trente cinq minutes, dans un grand et réjouissant maelström dramaturgique, dans une grande fresque habilement scénographiée, nous allons nous retrouver en 2025, nous irons à Mossoul en guerre, nous verrons les irrémédiables vandalismes historiques dûs à l'EI, nous voyagerons dans le temps pour côtoyer Sîn-Shar-Iskun, Nabû-Bel-Sûnna, Assur-Etîl-Ilâni. (Je vous laisse évidemment découvrir qui sont ces illustres Assyriens.)

L'espace des labyrinthes quantiques n'aura (presque) plus de secrets pour nous.
Sans oublier le détour par le cabinet d'un neurologue californien.

Et puis, surtout, surtout, nous irons dans le Wyoming, dans le Motel Assurbanipal (si si...), siège de hackers anonymes, dont le but est justement d'archiver les données numériques humaines dans...
Là encore, je vous laisse découvrir une excellente idée, qui nous procure bien des sourires.

Des héros, donc, ces pirates du dark-web.
De web-ingénieure anonyme, Mila Shegg va devenir elle aussi une héroïne.

Sept comédiens vont nous emporter dans cette vertigineuse épopée de l'écriture et de la connaissance.
Tous vont jouer plusieurs rôles. La pièce comporte une multitude de personnages.
Nous ne sommes jamais perdus, le texte est suffisamment fort pour nous y retrouver.

Le jeu est physique, avec parfois des moments très intenses, très « remuants »...
Une vraie cohérence règne sur le plateau, avec des acteurs engagés pleinement et qui servent au mieux le texte de l'auteure.
Des projections sur des rideaux de tulle apportent beaucoup d'informations importantes, la neige tombe parfois`en abondance.

Joséphine Serre nous propose donc un vrai moment de réflexion.
Nous sommes en permanence confrontés à la problématique énoncée plus haut, avec un jeu de miroir permettant à la fois une distanciation et une catharsis.
Notre propre rapport à l'écriture dans ce qu'elle a de permanent ou d'éphémère, notre participation propre à la production de données, ces aspects-là de nos vies sont intimement questionnés.

C'est un fort et intense moment de théâtre auquel elle nous confronte très habilement.

Ah ! J'allais oublier...
L'anagramme de Mila Shegg... Ca y est ? Vous l'avez ?
Pensez Mésopotamie...

© Photo Y.P. -

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