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Spéculum

Spéculum

Inititulerait-on « Clef de 12 » un spectacle consacré à la mécanique, que ceci aurait beaucoup moins de signifiant et d'impact que d'intituler « Spéculum » un spectacle autour de la gynécologie.


Ecrire, mettre en scène et jouer une pièce intitulée « Spéculum » relève d'une volonté de parler avec un vrai militantisme d'un sujet à la fois universel mais également emblématique en matière de luttes féministes.


Delphine Biard, Flore Grimaud et Caroline Sahuquet vont poser à la salle beaucoup de questions relatives à la gynécologie. Une salle composée hier majoritairement de spectatrices.


Ce spectacle est né de leurs parcours personnels, « de nos angoisses et de nos forces », écrivent-elles dans leur note d'intention.


Elles ont mis en forme leurs propres expériences en la matière, et parallèlement, vont donner la parole à une foule de personnages . Une cinquantaine à elles trois.


C'est ainsi qu'elles incarneront des personnages historiques, emblématiques de ce domaine médical.
Nous entendrons par exemple Agnodice, femme-médecin à Athènes, du IVème siècle avant J.C., Angélique-Marguerite Le Boursier du Coudray, sage femme du XXVIIIème siècle.


Elles interpréteront également la parole de gynécos, de médecins, révélant ainsi des situations hallucinantes de maltraitances psychologiques et parfois même physiologiques.


Elles décriront le vécu parfois hallucinant des patientes, des parturientes, la triste réalité des examens mais aussi des accouchements, des fausses couches, des avortements passés et présents.


De plus, elles donneront la parole à des journalistes, des auteures, avec la plus emblématique d'entre toutes, je veux bien entendu parler de Benoîte Groult.

Elles mettront en scène une conférence entre « éminents spécialistes », après une installation un peu laborieuse hier (fébrilité de première oblige) d'un pico-projecteur vidéo.


Cinquante personnages.
J'ai eu tendance à penser qu'en une heure et vingt minutes, c'était un peu beaucoup.
Certes, le sujet est vaste, mais la multiplication obligée de saynètes donne évidemment un côté foutraque assumé mais qui a tendance à mon sens à diluer la force de la démonstration.
A moins bien entendu qu'abasourdir la salle sous un flot d'infos et de témoignages ne soit un parti-pris délibéré.


D'autant que c'est avec énormément d'humour que tout ceci nous est proposé.
Oui, nous allons beaucoup rire.
Il faut être un spectateur également militant pour rire de bon cœur aux facéties de ces demoiselles.
Témoin cette première scène avec ce premier carton « Introduction » devant lequel deux praticiens en gants de vaisselle verts nous montrent leurs index et majeur.


Mais ce rire peut peut-être parfois minimiser lui aussi le propos. J'en veux pour preuve cette scène du débat évoqué plus haut entre « professionnels de la profession », rendu sur le mode de la farce burlesque.

Chacun se fera bien entendu sa propre idée.


En revanche, certaines scènes sont glaciales et font vraiment froid dans le dos, comme toute la partie consacrée au Distilbène, et à ses méfaits jusqu'à la quatrième génération des enfants des femmes à qui on a administré ce « médicament ».
Une magnifique dramaturgie est alors mise en scène, évoquant la douleur, la souffrance, le sang, la couleur rouge. C'est très beau. Et non, je n'en dirai pas davantage. A vous de découvrir.


C'est un spectacle bien intéressant que Mesdemoiselles Biard, Grimaud et Sahuquet nous proposent. Un spectacle qui ne peut laisser personne indifférent, qui dit les choses en appelant un chat un chat.

Les trois auteures-metteures en scènes-comédiennes réussissent leur démonstration, poursuivant un vrai combat qui ne devrait au passage pas être mené par seules les femmes.
Et ce par le biais d'une belle mécanique théâtrale.

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