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Dans la peau de Cyrano

© Photo Y.P. -

© Photo Y.P. -

Ce spectacle serait-il sponsorisé par l'UGAP ?
Le seul accessoire élément de décor de la pièce provient en effet de l'Union des Groupements d'Achats Publics.


Une chaise.
De celles que l'on trouve dans pratiquement tous les établissements scolaires de France et probablement de Navarre.
Siège et dossier de bois clair, piètement rouge.


Nous voici en effet dans un collège.
Un nouveau collège, en tout cas pour Colin, qui vient de déménager avec sa mère, et qui se retrouve à côtoyer ses nouveaux camarades.


Il n'en mène pas large, le Colin. Tout est nouveau pour lui, certes, mais il y a autre chose.
Il est affligé d'un défaut de prononciation. Il bégaie.
Difficile dans ces conditions d'être serein un jour de rentée scolaire.


A partir de cette situation de base, Nicolas Devort a écrit un très joyeux et à la fois bien émouvant moment de théâtre, qui va commencer avec une vraie question.


Pourquoi aimons nous les histoires, pourquoi aimons-nous qu'on nous en raconte, de ces histoires-là ?
Une question qu'on pourrait d'ailleurs reformuler de la sorte : Pourquoi aimons-nous le théâtre ?

 

Tel un Frégoli des temps modernes, Nicolas Devort aux sourcils fournis relevés à leur extrémité, va interpréter tous les rôles de la pièce, mais en gardant, lui, toujours le même costume, sweat-shirt et pantalon noirs.


C'est ainsi qu'il sera Colin, bien entendu, mais également tous ses camarades : le rigide Maxence, qui n'aime pas les gens négligés, Adélaïde, la bimbo sympathique, Benoît l'extraverti (c'est un euphémisme...), Gaïl qu'on imagine sorti d'une barre HLM de la cité voisine, biiiiiiiiim !...


Le comédien interprétera également tous les adultes et notamment une psychologue scolaire plus vraie que nature, et surtout le prof de Français, M. Demarsot, qui anime par ailleurs le club de théâtre du bahut.
Son projet pédagogique : monter Cyrano de Bergerac pour le spectacle de fin d'année.

Et ce qui devait arriver arrivera... Je n'en dis pas plus...


Cette galerie de personnages tous hauts en couleurs va défiler devant nos yeux, tous interprétés par Nicolas Devort, mis en scène par Clotilde Daniault.
Il va, vient, virevolte, saute, arpente le plateau, tourne autour de la chaise... Quelle énergie, quel rythme !


Mais ce qui force le plus l'admiration, c'est sa phénoménale capacité à brosser chaque caractère par un petit élément : une expression du visage, des gestes, des poses corporelles, des intonations...
En une fraction de seconde il change de personnage, que nous reconnaissons instantanément, même avant qu'il ne leur donne la parole.


Dans une rythme et une pulsation effrénés, sans aucun temps mort, nous sommes en présence de moments criants de vérité, de situations probablement vécues.
Il y a de la vie, du souffle, du panache (forcément...) dans tout ceci ! Et quelle vis comica, quelle force comique !


Il y a la forme, mais il y a également le fond.
Ce spectacle est une ode à la différence, qui déclenche une réelle empathie envers le héros qui a subi une blessure irréparable.

Derrière les fou-rires, se cachent de vraies plaies que la catharsis théâtrale aide à refermer.

C'est un spectacle intelligent, d'une grande sensibilité, sous couvert d'un rire d'une grande qualité.

Alors, pourquoi aimons-nous qu'on nous raconte des histoires ?
Parce que l'histoire que nous raconte Nicolas Devort, cette histoire-là est véritablement passionnante !

 

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