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Métropole

(c) Photo Y.P. -

(c) Photo Y.P. -

Ils sont six.
Sept avec le personnage principal de cette pièce. La ville.

Paris. Le grand Paris. Mais ça pourrait être n'importe laquelle des grandes métropoles de ce monde.


Les six personnages nous accueillent par un petit jeu, je vous laisse découvrir. Puis, ils nous chantent Charles Trénet.

« Un jour, le diable fit une java,

Qu'avait tout l'air d'une mazurka. […]

Et bien souvent aux heures des r'pas,

Le diable venait sur sa java
Frapper du pied dans les estomacs. […]
»


Ces trois hommes et ces trois femmes forment un groupe choral. Et pourtant...
Ils sont six... Ils sont un... Ils sont eux, ils sont nous...
Ils vont aller et venir dans ce lieu déshumanisé et sans âme qu'est la cité pour venir frapper dans nos estomacs.


Il y a un PDG très fortuné, une jeune diplômée d'école de commerce pour qui l'argent n'est pas non plus un souci, un cadre au chômage, un étudiant de cinquième année de médecine qui lui a besoin de travailler pour payer sa scolarité, une femme de ménage et une traductrice qui accessoirement gagne sa vie en tant que danseuse dans une boîte de strip-tease.


Qu'est-ce qui peut bien les lier, les réunir, les désunir, les rassembler, les éloigner, ces six-là ?


C'est exactement la question à laquelle va répondre Vincent Farasse, qui a écrit et mis en scène cette pièce. Il dissèque les relations existant entre ces personnages qu'à priori tout oppose.

Des relations d'une façon ou d'une autre tarifées.
L'argent tiendra une grande place dans cette pièce, comme si c'était le moteur principal de ces six urbains. Argent et Cité, un couple indissociable ?


Vont se dérouler devant nous une multitude de fragments, de multiples saynètes, à deux ou trois personnages. Au bout d'un certain temps, nous allons comprendre et nous allons nous rendre compte : nous pourrions dessiner sur une feuille de papier un organigramme ou une carte mentale représentant les liens qui se sont tissés entre ces trois hommes et ces trois femmes.

Certains de ces liens seront plus intimes, plus délicats, plus fragiles, aussi.
Avec un rêve presque final : la ville aux mains des insurgés, avec des barricades, avec des soldats...
(Bien entendu, hasard de la programmation, tous nous pensons à l'actualité la plus brûlante et la plus jaune.)

Cette ville rend certains plus forts, en affaiblit d'autres...
La ville, terrain social inégalitaire...


 

La mise en scène de Vincent Farasse est à l'image du texte : au cordeau et au scalpel. Pas de décors, un fond de scène constitué de trois pans avec environ une centaine de grosses ficelles torsadées de chanvre. (Vous aurez remarqué que je n'ai pas dit le mot...)
Des grosses ficelles qui symbolisent sans doutes les liens, ce qui relie et qui retient les unes et les autres.
Quelques chaises sur lesquelles resteront parfois ceux qui ne jouent pas.
Comme pour montrer que tous ces personnages sont décidément inter-dépendants.


Les six comédiens sont tous irréprochables et ne nous laissent pas souffler un seul instant.
Deux ont particulièrement retenu mon attention.

Eve Gollac est Claire, la strip-teaseuse traductrice.
La comédienne est impressionnante. Son rôle est particulièrement ardu. Sous couvert d'une apparente fragilité, son personnage se révèle être d'une force incroyable. Ses scènes en face du PDG m'ont particulièrement impressionné, au fur et à mesure qu'elles se déroulent.

Et puis il y Xavier, ce PDG-là.
C'est le formidable François Clavier qui l'interprète.
De par sa carrure impressionnante, il en impose. (D'autant plus que la scène est assez en hauteur par rapport aux sièges.)
Il nous fera rire, avec ses répliques redondantes, ses « plaisanteries » qui glacent les autres personnages, avec sa façon de servir le whisky « qui n'est pas pour les enfants »...
Il nous fait rire, mais le comédien parvient à installer une vraie ambivalence, une vraie ambiguïté.
A la fois doux et féroce, tendre et machiavélique, M. Clavier signe une sacrée composition.

C'est donc un bien intéressant moment de théâtre qui nous est donné à la Reine blanche. C'est un spectacle qui peut surprendre, qui peut parfois étonner, voire déranger, mais qui ne laisse personne indifférent.
Comme une métropole, quoi...

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