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Nubya Garcia en concert au Nice Jazz Festival

© Photo Y.P.

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Et une standing ovation, une !

En un tout petit peu plus d’une heure, la saxophoniste Nubya Garcia a offert au public exigeant du théâtre de verdure du Nice Jazz Festival un moment de temps suspendu.

L’un de ces moments musicaux où Vous vous retrouvez plongé avec le plus grand ravissement dans un univers musical à la fois onirique et éthéré, puissant et délicat, solaire et intense.

La jeune musicienne londonienne fait partie de toute cette génération d’artistes britanniques qui créent actuellement un jazz contemporain qui fait bouger les lignes et les codes.

© Photo Y.P.

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Tout en se revendiquant d’une filiation aux grands aînés, (il est impossible de ne pas trouver dans son jeu l’influence de Sonny Rollins ou de Coltrane), elle puise dans ses racines et dans son vécu personnel des influences afro-caribéennes totalement assumées.

Ici, dubstep, brokenbeat, trip-hop, voire reggae (elle avoue souvent son admiration pour le groupe Steel Pulse) viennent colorer son jazz on ne peut plus rigoureux et maîtrisé.
Nous sommes vraiment dans un multiculturalisme et un cosmopolitisme des plus réjouissants.

© Photo Y.P.

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Nubya Garcia est une musicienne on ne peut plus exigeante.
Ses compositions (le concert reprendra en partie les titres de son deuxième album, Odyssey, paru en 2024) relèvent d’une très grande qualité d’écriture, avec des structures très précises, au service d’un propos réjouissant.

Naviguant allègrement entre des modes complexes et subtils, des progressions harmoniques très ambitieuses et très riches, mais sans jamais toutefois tomber dans un excès de pédanterie ni d’affèterie, cette écriture est toujours passionnante.

Nous sommes souvent sur le fil, dans une sorte de déséquilibre totalement assumé et maîtrisé, qui procure des émotions intenses aux spectateurs.
Nous avons le sentiment de progresser sur des lignes musicales à la fois lumineuses et parfois sombres, dans une sorte d’oxymore que seuls les grands créateurs savent proposer.

Miss Garcia est une talentueuse technicienne du saxophone ténor.
Son discours est d’une cohérence de tous les instants : sans jamais céder à cette mode du bavardage (notamment trop souvent hexagonale) qui consiste à mettre des notes partout, à surcharger un jeu tendant à confiner à la saturation et par là-même à une réelle exaspération, la jeune musicienne, bien au contraire, nous démontre son talent avec certes un jeu précis et virtuose mais toujours au service d’un discours des plus construits.

Ce discours original lui permet de peindre des atmosphères et des univers riches et multiples.
Ses thèmes, ambitieux et subtilement mis en avant, ainsi que ses ses solos vont nous procurer bien des frissons et bien des émotions.
Moi, j’étais souvent bouche bée devant ces longues mélopées un peu plaintives qu’elle développe seule devant son micro et ses pédales d’effets. On ressent parfois un véritable cri dans ce qu’elle joue.

Le son de son ténor est souvent réverbéré, devenant ainsi onirique, un peu mystérieux. Tout ceci dans un souci permanent de ne jamais « en faire trop ».

Le curseur est placé à chaque fois à son exacte position. Nous sommes parfois proches du free, mais sans jamais tomber dans la caricature, bien au contraire !
 

© Photo Y.P.

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Aux différents claviers, Lyle Barton est lui aussi pour beaucoup dans la création de ces mondes sonores et musicaux.

Que ce soit par le biais des grandes nappes syntéthiques de son Prophet Sequential Circuits, les notes cristallines de son Fender Rhodes, sans oublier les sons plus « traditionnels » de son Steinway & Sons, le musicien apporte à Mademoiselle Garcia un support harmonique d’une grande richesse.
Des couleurs musicales poétiques émergent en permanence du jeu du claviériste, qui permettent à la saxophoniste de poser ses propres notes dans des moments d’une grande suavité ou au contraire d’une grande énergie.

© Photo Y.P.

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L’énergie ! La puissance ! Le foisonnement ! Le groove de braise et de feu !
Le duo basse-batterie va se charger de mettre en œuvre ces torrents de lave en fusion qui déferlent et qui vont donner au set une dimension organique et viscérale.

Mark Luthert à la contrebasse et Sam Jones à la batterie vont nous procurer eux aussi matière à nous réjouire.
Ces deux là semblent se jouer de la pulsation, du rythme, n’hésitant pas à mélanger différentes mesures simultanément, à casser leur jeu provoquant ainsi des breaks hallucinants.
Leur façon d’appréhender ces ryhmes contemporains est épatante, « retombant toujours sur leurs pattes », alors que nous autres spectateurs nous demandant souvent comment ils vont arriver à s’y retrouver.
Deux virtuoses, eux aussi qui participent pleinement au sentiment de déséquilibre assumé évoqué un peu plus haut.

© Photo Y.P.

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Il est à noter que les quatre artistes nous montrent en permanence à quel point ils prennent du plaisir à jouer, à nous proposer ce jazz original et fusionnel.

Standing ovation, donc, à l’issue de ce magistral concert.
Comment pouvait-il en être autrement ?

Comme beaucoup d’autres spectateurs, j’ai eu le sentiment de devenir un véritable privilégié, à vivre un moment rare, à découvrir (je ne l’avais jamais vue sur sur scène) une artiste sur laquelle il faut dorénavant compter et qui va continuer à ouvrir des horizons au jazz.

© Photo Y.P.

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