Les contes d'apéro, au kiosque du Théâtre National de Nice

Alexandre Diot-Tchéou - © Photo Y.P. -

Et vous, combien d’auteurs du XVIII^ème siècle pourriez-vous citer, dans les trois secondes qui suivent ?

C’est en effet cette question que pose aux spectateurs Alexandre Diot-Tchéou, le Maître de cérémonie de cette nouvelle soirée des Contes d’Apéro.

Les Contes d’Apéro, c’est une petite forme originale, une heure et quart de lecture d'extraits d'œuvres connues ou moins connues, que Muriel Mayette-Holtz, la patronne du Théâtre National de Nice propose aux amoureux des beaux textes, et ce, jusqu’au 3 août prochain, au kiosque de la Promenade du Paillon.

Ces lectures sont dirigées par un comédien ou une comédienne et sont données par des élèves fort talentueux de l’ERCAM, l’Ecole Régionale de théâtre de Cannes-Marseille.

Chaque jour de la semaine correspondant à un siècle précis, j’ai donc assisté hier mercredi à une lecture d’écrits du XVIII^ème siècle.

D’où la question de l’espiègle Alexandre Diot-Tchéou qui pour présenter la soirée avait pris la voix d’un célèbre animateur très versé dans les palpitantes existences des têtes couronnées de ce monde, dans l’organisation de loteries du patrimoine et dans le port de chaussures tricolores les soirs de feu d’artifice du 14 juillet sur le champs de mars. Vous l’avez ?

C’est donc avec cette voix très drôle et un peu caricaturée, il faut bien l’avouer, que le comédien va « piéger » gentiment le public, qui immanquablement ne va citer que Marivaux et les philosophes des Lumières.

Lui, ce qui l’intéresse, Alexandre Diot-Tchéou, ce qui constitue une grande partie de son travail dramaturgique, c’est avant tout la redécouverte de textes méconnus ou tout du moins tombés dans l'oubli.

De plus, ce seront des autrices qui vont constituer les 95% des lectures de la soirée.
Après un bref rappel des tenants et aboutissants de ce siècle ô combien important, avec notamment la déportation de quelque sept à huit millions d’esclaves africains, le comédien va donner la parole à Olympe de Gouges.

En l’occurrence, ce sera Carla Ventre qui à trois occasions, d’une voix assurée, revendicatrice, militante au sens noble du terme, nous dira les trois premiers articles de sa Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne.
Un texte ô combien d’actualité, ces droits des femmes étant encore tellement bafoués.

Carla Ventre - © Photo Y.P. -

Et puis MC ~~Stéphane~~ Alexandre a choisi deux autres autrices françaises, une romancière et une dramaturge, dont le commun des mortels a oublié l’existence en général, et les œuvres en particulier.

En 1798, Sophie Cottin publiait anonymement son roman épistolaire Claire d’Albe, dont les droits d’autrice permettront au Comte de Vaublanc de quitter la France, prompte en ce temps-là à étêter de façon définitive les membres de la noblesse.

Manon Tanguy nous lira quelques unes de ces lettres, mettant en exergue le style de Sophie Cottin : sous couvert d’une histoire assez simple, la romancière nous expose de manière quasi sociologique sa connaissance du sentiment amoureux chez ses contemporains et surtout ses contemporaines.

Et nous de nous passionner par cette correspondance entre cette Claire d’Albe et sa cousine, décrivant remarquablement les progrès d’un amour interdit.

Manon Tanguy - © Photo Y.P. -

Une autre autrice sera mise à l’honneur en la personne de Marie-Anne Barbier, dramaturge française née en 1664.
Nous allons assister à la lecture d’une scène clef de sa pièce Le faucon, écrite en 1719, et jouée à la Comédie Française.
Pour autant, la postérité ne se souvient que très peu de cette œuvre, qui renverse les codes amoureux.
Au fond, ici, l’héroïne Axiane fait entendre à tous ses revendications concernant l’égalité dans une relation amoureuse.

L’extrait choisi nous fait entendre cette Axiane (c’est Léa Gautier qui lit ses répliques), aux prises avec un soupirant nommé Fédéric (oui oui Fédéric, interprété par Eliot Piette) et son valet Pasquin (Alexandre Diot-Tchéou en personne).

Et puis ce dernier a lui-même concocté un final musical à la soirée.
Un autre pied de nez, une « minute culinaire et musicale», nous préviendra-t-il.
Comme pour nous rappeler que la cuisine fut longtemps, trop longtemps, une activité uniquement reléguée à la gent féminine.
Nous nous amusons beaucoup à l’énumération de ces sauces, de ces croûtes, et de ces recettes de poulet gras, le tout mis en chanson par les soins du comédien.

Les cinq comédiennes et comédiens seront très applaudis. Ce ne sera que justice.
Nous sommes tous conscients d’avoir passé une délicieuse soirée littéraire et dramaturgique, de ces soirées qui permettent de savourer pleinement la langue française grâce à des textes si joliment mis en valeur.
Les Niçois ont beaucoup de chance !

Les Contes d'apéro - Théâtre National de Nice

Durant la période estivale, Les Contes d'apéro animent le Kiosque du TNN sur la Coulée verte, tous les soirs à 19h. Ouverture avec Le Legs, nouvel épisode de la Saga Marivaux, mis en scène pa...

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