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Poetic Ways en concert au Festival Jazz à Saint-Germain des Prés

© Photo Y.P. -

© Photo Y.P. -

Poetic Ways…
Tous les chemins poétiques mènent à la cour Mansart de la Monnaie de Paris.

C’est en effet dans ce lieu prestigieux, récemment rénové, que les cinq musiciens de l'ensemble Poetic Ways jouaient hier soir, dans le cadre de la 25ème édition du festival Jazz à Saint Germain des Prés.
Un lieu magnifique, mais très difficile à sonoriser, malgré toute la bonne volonté et le talent de l’ingénieur du son FOH. Quatre murs de pierre, où le son tourne impitoyablement, réverbéré au maximum, empêchant une définition et une précision optimales.

Malgré cette contrainte, sous leur petite tente, les cinq musiciens de Poetic Ways nous ont proposé leur jazz certes exigeant, mais toujours passionnant.

Poetic Ways, c’est un quintet créé juste après la pandémie que l’on sait.
Une demande formulée au saxophoniste Raphaël Imbert, ci-devant directeur du Conservatoire Pierre Barbizet de Marseille.
Une affaire de rencontres, comme il nous le précisera.
Une section rythmique aux petits oignons, avec Anne Pacéo à la batterie et Pierre Fenichel à la contrebasse.
Au piano Pierre-François Blanchard, à la voix Celia Kameni.
Depuis cette année, Mademoiselle Paceo a quitté le groupe, remplacée par l’excellent Pierre-François Dufour, qui parfois peut troquer ses caisses et ses fûts (honni soit qui mal y pense...) contre son violoncelle.

Des musiciens qui ont chacun beaucoup joué dans leurs propres formations sur des scènes prestigieuses, et qui se sont « trouvés » pour ce projet.
Sans album pour le moment, c’est la première fois qu’ils jouaient ensemble à Paris.
On attend évidemment avec impatience de pouvoir retrouver gravées sur un vinyl les principales compositions de cette aventure jazzistique à la fois on ne peut plus originale et unique en son genre.

De très beaux moments musicaux nous attendent.
Poetic Ways, un jazz de contrastes et d’oxymores.
Un jazz de mélanges, de métissages, également. Ce dont nous avons tant besoin en ce moment.

Tout commence un peu à la Jean-Sébastien Bach, dans une sorte de fugue contemporaine avec un délicat thème au piano, rejoint par la magnifique voix de Célia Kameni.
Le contrepoint ne tarde pas à arriver, par le biais du saxophone ténor. La ryhtmique peut entrer également en jeu.

Contrastes et oxymores, donc.
La voix de Mademoiselle Kameni peut se montrer d’une grande douceur presque fragile pour enchaîner avec une puissance presque sauvage, à l’image du tigre de l’affiche du festival.
Les ballades peuvent se muer subtilement en sortes de transes abruptes, avec des vocalises intenses et farouches, rejoints souvent par le saxophone ténor.
Elle chante en Français (dont un titre évoquant la mer, aux paroles écrites par l’épouse du saxophoniste, « une affaire de famille, précisera-t-il…), mais également en Anglais, langue de ses premiers concerts.

© Photo Y.P.



 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jazz métissé, aussi, avec notamment une composition au groove très chaloupé, presque caribéen, avec les triolets de noires du contrebassiste Pierre Fenichel, alors que des mouettes très rieuses survolent la cour à ciel ouvert.

Raphaël Imbert va nous rappeler qu’il est l’un des grands techniciens français du ténor.
Oui, il joue vite, très vite même, mais il joue surtout très bien. Quel euphémisme !
Ses chromatismes fulgurants, ses allers-venues dans la tessiture entière de son instrument, (ah ses graves lourds et somptueux), ses improvisations lumineuses et sidérantes, tout ceci plonge les spectateurs dans un grand ravissement.
Dans ces moments, nous sommes proche d’un free jazz assumé, à la fois improvisé et très construit.
Contrastes et oxymores, vous dis-je...
Le saxophoniste jouera par ailleurs de ses bec et anche seuls, parvenant à créer des mélodies uniquement avec ces deux éléments.
Pas donné à tout le monde, non ?

© Photo Y.P.



















Poésie également.
Baudelaire sera de la partie.
Célia Kameni et Raphäel Imbert ont en effet initié voici quelques années un passionnant projet en lien avec le grand écrivain martiniquais Patrick Chamoiseau, dans l’évocation de la musique et des ryhtmes de la langue du grand Charles.
La mort des Amants sera ainsi mise en musique, dans une remarquable composition, au cours de laquelle les spectateurs retiennent leur souffle.
C’est magnifique et bouleversant.

Le jazz de Poetic Ways est également un jazz de passerelles, reliant entre elles différentes esthétiques, allant du classique (parfois Fauré n’est pas loin…), du jazz traditionnel (comme cette pièce folklorique populaire des Appalaches états-uniens), à des formes beaucoup plus contemporaines.

Très logiquement, le public applaudira chaleureusement ce quintet à nul autre pareil.
Nous sommes toutes et tous conscients d’avoir vécu un magnifique et passionnant moment de jazz contemporain.

 

© Photo Y.P.

 

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