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Que d'espoir !

© Photo Y.P.

© Photo Y.P.

L’Homme ! Une espèce prothésée ?

Oui, des prothèses, nous allons en voir, dans ce nouveau cabaret «lesortien ».
Après le monde des horreurs et autres monstruosités, Valérie Lesort nous entraîne dans l’univers d’Hanokh Levin.

Celle qui vient de nous proposer une réjouissante et toute personnelle version des contes de Perrault au Théâtre de l’Athénée, celle-ci transpose sur la scène du Théâtre de l’Atelier la vision de l’humanité du dramaturge israélien.

Une vision sans concession, qui renvoie chacun d’entre nous à sa dérisoire condition humaine.

 

Car tel est le propos de ce spectacle constitué d’un montage de textes issus de différents cabarets d’Hanokh Levin.

Une galerie de personnages, tous plus attachants les uns que les autres, vont venir nous dire nos angoisses, nos espoirs, notre course effrénée vers un bonheur idéal et chimérique.

Il s’agit de faire se succéder un panorama (non exhaustif) d’identités plus ou moins remarquables, des hommes, des femmes ou autres, qui nous disent leur vérité propre. Enfin, propre… Je vous laisse découvrir une certaine scène drôlissime…

 

Valérie Lesort, à son habitude, transforme ces personnages on ne peut plus humains en êtres aussi démesurés que désarmants de tendresse, tous en proie à leur existentielle angoisse.

 

Pour elle, qui dit « êtres démesurés », dit mutations physiques.

Elle qui a recours très souvent à différentes sortes de marionnettes, utilise cette fois-ci de multiples prothèses que l’on doit à Carole Allemand, fidèle complice artistique d’entre les fidèles.

C’est ainsi que tous les personnages seront affublés d’éléments de latex, de matière plastique ou de costumes rembourrés en tissu, des éléments qui vont mettre en avant et accentuer nos petits défauts physiques. Nous verrons des Vénus très callipyges, des bellâtres aux mâchoires très carrées, des bimbos aux chevelures "choucroutesques", des vieilles à la poitrine tombante, que même plus tombante ça ferait trop.

 

Au fond, nous nous trouvons dans le monde de Barbie, une Barbie désenchantée, vieillissante et désabusée.

Les codes couleur, tout droit issus des comics, avec des tons primaires, saturés et flashy, contribuent à cette dimension graphique et décalée.

© Photo Y.P. -

© Photo Y.P. -

Quatre artistes ne vont ménager ni leur peine ni leur énergie pour incarner tous ces êtres humains à la fois désespérés et d’une certaine manière désespérants.

Hier, Valérie Lesort jouait elle-même certains personnages dont le rôle d’Elodie, avec la vis comica qu’on lui connaît.
Elle est en alternance avec Céline Milliat-Baumgartner, qui reprend actuellement son texte Les bijoux de pacotille au Théâtre de La Bastille, toujours dans une mise en scène de Pauline Bureau.
Elle fait fonctionner nos zygomatiques à plein régime, avec des créatures assez improbables mais tellement humaines.

 

Qui dit cabaret dit musique.

Des chansons d’Hanokh Levin dans une traduction de Laurence Sendrowicz ont été mises en notes par Charly Voodoo, le célèbre hôte du cabaret Madame Arthur.

Le musicien et comédien a su conférer au spectacle cette dimension exacerbée propre à ce style de cabaret. Il ne sera pas le seul chanteur puisque ses petits camarades de jeu s’empareront eux aussi du micro.

 

Hugo Bardin fait partie de la distribution et apporte lui aussi sa pierre à l’édifice cabaret. On se souvient qu’en 2002 il participait sous les traits de son personnage Paloma à l’émission « Drag Race France », la version française de la plus grande compétition de drag-queens au monde.

Lui aussi nous fera beaucoup rire, notamment dans le rôle d’une femme de ménage très haute en couleurs, raciste, homophobe, hypocondriaque, nous livrant des détails scatologiques croustillants comme par exemple ceux sur l’utilisation des suppositoires.

 

David Migeot complète le quatuor de façon toute aussi convaincante, avec en particulier un rôle de client d’hôtel comme on n’en rencontre guère !

 

Il faut tirer un coup de chapeau à Pascal Laajili pour la création lumière et Romain Laporte pour la mise en espace : l’ambiance cabaret, avec ses paillettes, ses strass, ses ronds de lumière, ses atmosphères enfumées est bel et bien présente.

 

Au final, nous sortons de l’Atelier totalement convaincus : Valérie Lesort s’est parfaitement approprié la dérision, la fatalité et surtout l’humour contenus dans l’œuvre d’Hanokh Levin. On retrouve tout ce que l’on aime dans la vision philosophique de cet auteur majeur du XXème siècle, une vision désabusée, tendre et fataliste de notre sort commun à tous.

 

Il faut vraiment assister à ce cabaret théâtral maîtrisé de bout en bout !

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