17 Juillet 2024
Murmurations et murmures hors les murs.
Murmuration : nf, anglicisme. Regroupement important d’oiseaux en vol, nuage d’oiseaux.
Voici ce que nous apprend le petit Larousse.
Ces murmurations, c’est le thème principal de ce magnifique et humaniste spectacle, créé par Rachid Ouramdane, le patron du Théâtre national de Chaillot, avec le ballet de l’Opéra de Lyon et la Compagnie XY.
C’est également le propos de Jean-Benoît Dunckel, le cofondateur du groupe Air, dans le cadre d’une commande de Radio France pour sa Maîtrise.
Durant une heure, il va s’agir pour la troupe de danseurs et la compagnie d’acrobates-voltigeurs de s’affranchir de l’espace, du temps, pour nous proposer d’impressionnants tableaux, spectaculaires et oniriques au possible.
Danseurs, acrobates et chanteurs vont donc prendre possession de la grande nef du Panthéon, pour la transformer en lieu de tous les possibles.
Un lieu où vont se mélanger une trentaine de nationalités, des corps rompus à différentes disciplines artistiques, des corps variés, différents les uns des autres.
Un lieu où la fraternité et le partage sont évidents et naturels, où la compréhension et le respect de l’autre sont absolument nécessaires et indispensables, pour le bien d’un projet commun.
Les protagonistes du spectacle ont pris possession des travées extérieures, tout autour de la nef.
Tous habillés de noir, chacun dans un costume différent. Coup de chapeau à Sigried Petit Imbert.
Telle une volée d’oiseaux, en courant, créant ainsi un tout premier sentiment incroyable de mouvement, d’énergie et de puissance, ils se précipitent sur le sol immaculé.
Le contraste est saisissant. Nous sommes tous saisis par ces corps qui courent, se frôlent, ne se touchant jamais malgré leur grand nombre.
C’est très beau.
Les infrabasses, les premières nappes de cordes synthétiques de JB Dunckel sortent des enceintes acoustiques.
Tout comme dans ces nuages d’étourneaux en vol, nous avons immédiatement la vision d’une grande maîtrise de tous les mouvements, donnant pourtant l’impression d’un grand désordre.
Ce premier tableau créé une sidérante vitalité, une intense pulsation vitale et organique.
Mais nous ne sommes pas au bout de nos surprises et de notre admiration.
Au fond, durant cette heure qui passera beaucoup trop vite, il s’agira de mettre en lumière quelques verbes : courir, danser, mais aussi porter, lancer, s’élever, ou encore lâcher prise.
Une dimension aérienne sera omniprésente.
D’ailleurs, je vous conseille d’arriver en avance et de vous asseoir tout près de la scène, dans le dispositif tri-frontal : vous sentirez l’air qui se déplace, en raison des mouvements de la centaine d’artistes.
Les danseurs lyonnais vont démontrer tout leur talent et leur savoir faire, interprétant avec brio la chorégraphie de Rachid Ouramdam.
La grâce, la légèreté, la précision frappent les esprits, avec une impression de facilité déconcertante. On pourrait presque se dire « comme c’est facile... »
Les voltigeurs de la compagnie XY vont quant à eux nous faire frissonner avec notamment des pyramides humaines, parfois hautes de quatre étages.
La grâce, la délicatesse vont régner en maîtresses.
Nous allons oublier purement et simplement toute notion de force, de puissance, de difficultés techniques, pour ne retenir que notre admiration devant ces jeunes femmes et ces jeunes hommes qui se retrouvent portés avec grâce par leurs camarades, au mépris de la pesanteur.
Une délicate et réjouissante verticalité sera alors mise en œuvre.
Les corps qui tombent également. Volontairement.
Le lâcher-prise avec les chutes dans les bras des autres acrobates, qui assurent le tomber (souvent en arrière) et qui empêchent toute blessure.
Là encore, beaucoup de frissons.
Nous comprenons très vite les oppositions stylistiques qui se créent : l’individu avec ou face au groupe, la solitude face au nombre, l’énergie opposée au calme.
Tout ceci relève de la plus grande intelligence.
La musique se prête évidemment au caractère onirique du propos général.
Des pièces éthérées sont diffusées, avec souvent des percussions étranges, rythmant le tout.
Les membres de la Maîtrise de Radio France interprètent quant à eux des clusters vocaux du plus bel effet, contribuant eux aussi au caractère aérien du spectacle.
Les jeunes chanteurs danseront eux aussi. Une pièce a été chorégraphiée spécialement pour eux.
Finalement, Rachid Ouramdame nous l’affirme : tout le monde peut danser.
Une standing ovation complètement méritée vient saluer tous les artistes.
Ce spectacle est un pur moment de grâce qui vient vous faire toucher du doigt le concept de bonheur !
Ne manquez surtout pas ce magnifique spectacle hors du commun, ode à la diversité et au mélange, où les arts de la musique, du chant, de la danse et de l’acrobatie se conjuguent parfaitement.
Il sera à nouveau donné les 17 et 18 juillet prochains, toujours au Panthéon. Il faut réserver sur le site du Théâtre de Chaillot.
Il sera également diffusé le 23 juillet sur France Télévisions / Culture Box.
(Vous trouverez les liens ci-dessous.)
Quand à l’album éponyme de JB Dunckel, il sera disponible sur toutes les plate-formes habituelles de streaming à partir du 19 juillet.
Möbius Morphosis au Panthéon, Paris Rachid Ouramdane & la Compagnie XY | Théâtre de chaillot
Chaillot - Théâtre national de la Danse - Site Officiel - Möbius Morphosis au Panthéon, Paris Rachid Ouramdane & la Compagnie XY - 16 juillet 2024. Rachid Ouramdane et la Compagnie XY se réuni...