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West Side Story

© Photo Y.P. -

© Photo Y.P. -

A l’Ouest, du nouveau !

Je n’irai pas par quatre chemins : il faut impérativement assister au retour de ce mythique musical, au Théâtre du Châtelet !

Avec cette nouvelle production qui parcourt en ce moment le monde entier, comme il est bon de se replonger dans les délices de cette comédie musicale qui fête ses 65 ans !

Comment ne pas avoir des frissons en ré-écoutant pour une énième fois ce chef d’œuvre qu’est la partition de Leonard Bernstein, associée au livret de Arthur Laurents et aux lyrics de Stephen Sondheim ?

Comment ne pas vibrer en entendant à nouveau America, Tonight, I feel pretty, ou encore Maria, pour ne citer que les plus célèbres airs de cette adaptation du Roméo et Juliette de feu le regretté William Shakespeare ?

Nouvelle production donc, avec aux manettes le metteur en scène Lonny Price, qui a parfaitement su s’appuyer sur la mise en scène et la chorégraphie originelles de Jerôme Robbins, tout en parvenant à insuffler ses propres idées, sa propre dramaturgie.

Certes, la marge de manœuvre est assez étroite : il est en effet hors de question de chambouler toute une dramaturgie que viennent précisément applaudir des spectateurs qui connaissent par cœur l’œuvre, mais Mister Price a réussi à créer un spectacle qu’il a su prendre à bras le corps pour en tirer deux heures trois quarts personnelles et qui rendent parfaitement compte de la volonté des auteurs. En outre, un sentiment de réalisme, de vérité se dégage en permanence.

De très grands moments nous attendent, dans cette histoire des Jets et des Sharks, ces gangs new-yorkais rivaux, cet amour impossible entre deux jeunes gens, ce destin maudit des deux amants que sont Maria et Tony.

Lorsque l’on pénètre dans la salle, l’œil ne peut qu’être attiré par la majestueuse scénographie qui n’attend que le premier accord de l’orchestre pour s’animer.
Bienvenue dans l’Upper West Side, années 50, ses rues bruyantes aux sirènes de police stridentes.

Tout au long du spectacle trois imposants éléments de décors sur roulettes se transformeront, révéleront tout plein de rues et de lieux différents.
Le magnifique travail de la scénographe Anna Louizos, associé aux lumières de Fabrice Kebour (qui remet au goût du jour avec beaucoup d’à propos l’utilisation du projecteur de poursuite et du rond de lumière), tout ceci nous plonge de façon saisissante dans ces bas-fond New-Yorkais du milieu du XXème siècle.

Par ailleurs, deux immenses cyclos feront leur apparition à des moments cruciaux du spectacle. Je vous laisse évidemment découvrir.

Cette scénographie est l’un des éléments essentiels de cette production, tout comme l’orchestre dirigé par Grant Sturiale.
Le célèbre chef dirige d’une main de maître ses vingt musiciens, tous excellents, parvenant à restituer avec maestria et subtilité les moindres nuances de la partition de Bernstein.
On ressent en permanence la parfaite connaissance des moindres recoins du score du célébrissime compositeur.

Il me faut insister sur la formidable qualité sonore et acoustique de ce spectacle, mélangeant de nombreuses sources, tant instrumentales que vocales.

Une prise de son impeccable, une restitution d’une clarté et d’une précision absolue règnent en permanence.

Et puis bien entendu, chanteurs, comédiens et danseurs vont purement et simplement nous enchanter.

Comment ne pas s’émerveiller devant le professionnalisme, le talent ou plus exactement les talents réunis de ces jeunes artistes américains, tous issus des plus prestigieuses écoles US, que ce soit le Chicago College Performing arts, ou encore l’Université Pace de New-York.

Une impressionnante cohérence artistique habite toute la troupe.
Ici, en permanence, règne un sentiment de professionnalisme hyper-millimétré.
A ce titre, les chorégraphies résolument actualisées et modernisées de Julio Monge sont de toute beauté.
A chaque tableau, tous les danseurs nous séduisent par cette faculté d’occuper l’espace et leur capacité à se mouvoir dans un ensemble parfait.
(Coup de chapeau au passage au créateur des costumes, Alejo Vietti, qui a su incarner les deux clans dans de subtiles camaïeux, ocre et rouge pour les Portoricains, crème et bleu pour les natifs. Une magnifique entité visuelle.)

Et puis, bien entendu, les chanteurs.
Là encore, ce sera un ravissement de tous les instants.
Il n’y a pas de petit rôle, et tous sont eux eussi irréprochables.

Trois d’entre eux ont retenu mon attention.

Jadon Webster et Melanie Sierra - © Photo Y.P. -

Jadon Webster et Melanie Sierra - © Photo Y.P. -

Le couple-phare, tout d’abord.
Jadon Webster et Melanie Sierra incarnent respectivement Tony et Maria, avec un charisme et une sensualité de tous les instants.
Le timbre chaud, rond, sensuel du ténor contraste subtilement avec celui solaire de la soprano, qui cultive une voix avec un aspect un peu « métallique », très tendance.

Les deux se complètent admirablement. Il est impossible de ne pas croire à l’histoire d’amour de leurs personnages.

Les deux artistes vont également danser, dans une magnifique scène, très onirique.
La chanson Somewhere est prétexte à un tableau qui exalte la fraternité, la paix et l’amour, alors que tous les antagonistes se retrouvent au sein d’une même humanité habillée de blanc.
Les voix sont pré-enregistrées, ce qui permet aux deux héros de danser, eux aussi. Et très bien.

Kyra Sorce - © Photo Y.P. -

Kyra Sorce - © Photo Y.P. -

Mais celle qui illumine le plateau à chacune de ses apparitions, c’est bien Kyra Sorce, dans le rôle d’Anita.
C’est elle qui m’a véritablement marqué !
Est-il possible de concentrer autant de talents dans une seule artiste ?
Sa capacité à jouer la comédie force le respect, avec une puissance, une énergie, une vis comica épatantes.
En espiègle et «muy  calliente » belle-sœur de l’héroïne, elle est tout simplement formidable.
Elle chante à la perfection, avec un sens du phrasé, de la nuance et de la mélodie remarquables.
En danseuse de mambo, elle est parfaite !
Une très grande Anita. Peut-être la plus grande de ces vingt dernières années !

Une ovation ô combien méritée attend tous les artistes lors des saluts, les « bravo » fusent, beaucoup de spectateurs se lèvent spontanément.
Comment pourrait-il en être autrement ?

Ne manquez pas cette version de West Side Story, une version qui fera date dans l’histoire de cette comédie musicale.
Un spectacle incontournable de cet automne 2023.

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