9 Octobre 2022
Qui va piano va Studio Hébertot !
Enfin ! Il est de retour derrière le clavier de son piano, Jean-Paul Farré !
Celui que j’ai déjà vu se faire cuire un œuf sur un réchaud de camping tout en interprétant différentes œuvres pour l’instrument aux touches noires et blanches, celui que j’ai déjà surpris sous un chapiteau de cirque suspendu en l’air et se balançant avec le susdit instrument, celui-là vient d’ajouter un nouvel opus à son importante œuvre pianistico-humoristico-clowno-poétique.
Jean-Paul Farré, ou le piano dans tous ses états.
Fa-ré. Deux notes. Prédestination ?
Il nous attend sur le plateau de la salle, assis devant un quart de queue Yamaha, en interprétant plusieurs ballades de sa composition.
Appliqué, concentré, avec derrière lui une gigantesque partition comportant un nombre impressionnant de notes en tous genres et autres symboles musicaux.
Et puis soudain, il se tourne vers nous, de façon très brusque, avec un regard de stupéfaction, les yeux comme des billes.
Le concertiste vient de s’apercevoir que nous étions là, nous autres spectateurs.
Concertiste ? Vraiment ?
Que non pas !
Devant nous, c’est un tout autre personnage qui se présente : lui est coach pour piano.
Un type qui prépare, entretient, astique le piano pour le maestro qui donnera le concert à venir.
Un homme qui sait tourner les pages de la partition (le métier est en voie de disparition, nous apprendra-t-il).
Un musicien qui nous révèlera que son instrument est sur écoute, qui pêchera pour avoir des touches, et qui nous dira son ravissement d’avoir pu acheter des claviers en promo.
Durant cette heure un quart de spectacle, nous allons suivre les tribulations de ce petit homme aux cheveux blancs ébouriffés comme il se doit, dans une subtile succession de tableaux drôles, très drôles même, poétiques, parfois surréalistes.
Mis en scène par Stéphane Cottin, M. Farré ne va pas ménager sa peine.
C’est un Auguste, que nous avons devant nous, avec « un clown blanc qui est noir », nous fera-t-il remarquer.
Oui, le rapport à la piste circulaire est toujours là.
Le clown-Farré qui délimite son espace de jeu en faisant des tours de trottinette ou en entourant son piano de morceaux de claviers défunts pour exécuter ses gags.
Nous sommes vraiment dans l’univers clownesque.
Un univers dans lequel la logique est poussée dans ses derniers retranchements : on astique un piano, alors forcément, pour ce faire, on.... (vous n'en saurez pas plus...)
Nous sommes donc également comme toujours chez les grands clowns, dans le monde de l’enfance, ce monde dans lequel la phrase « On dirait qu’on serait un-tel, et on dirait qu’on ferait ceci ou cela…. » cette phrase a tellement d’importance.
Un monde où tout peut arriver, tout est possible et dans lequel les limites que l’on respecte sont celles que l’on veut bien s’imposer.
Une nouvelle fois, le seul-en-scène (pardon.. le spectacle en solitaire) de Jean-Paul Farré relève de cette dimension-là.
D’autre part, qui dit clown dit rapport particulier aux objets.
Ici, le personnage va utiliser encore et toujours quantité d’objets qui n’ont rien à voir avec l’univers du piano.
Comme notamment dans cette remarquable séquence avec un gros ballon de fitness.
Comment faire intervenir dans le spectacle un objet dont la grosseur et l’incongruité va déclencher nos rires.
Cette grosse boule blanche donne l’un des magnifiques moments de poésie surréaliste du spectacle. Je vous laisse évidemment découvrir la scène par vous-mêmes.
On ne peut pas s’empêcher de rapprocher cette scène avec celle du film Le dictateur, dans lequel Chaplin-Hynkel jongle avec un gigantesque globe.
Autre grand moment de poésie, celui dans lequel le pianiste se retourne vers sa gigantesque partition et va interagir avec elle.
Ce spectacle comporte en effet de très belles et très réussies projections video, qui permettent au comédien-musicien de « dialoguer » avec ses notes, une croche en particulier, d’empoigner les portées et de se saisir physiquement de la notation musicale.
L’effet est très beau, et confère là encore une dimension toute poétique.
De nombreux, très nombreux autres accessoires feront fonctionner nos zygomatiques.
Une fois le rideau tiré, ce spectacle est de ceux où le régisseur plateau et le comédien mettent beaucoup de temps à tout ranger !
Ne manquez pas surtout pas ce seul-en-scène.
C’est brillant, c’est intelligent, c'est malin, c’est hilarant, c’est poétique.
C’est Jean-Paul Farré !
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Dessine-moi un piano - Studio Hébertot
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