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[REPRISE] L'histoire d'une femme

© Photo Y.P. -

© Photo Y.P. -

Au Rond-Point, depuis le 6 novembre dernier, Muriel Gaudin reprend la pièce de Pierre Notte L'histoire d'une femme.

Une histoire bouleversante.

Une chronique des « sexismes ordinaires », volontaires, assumés, ou bien « involontaires ».

Il est des histoires qu'il est nécessaire de raconter.
"L'histoire d'une femme" fait partie de celles-ci.

Voici ce que j'écrivais en mars 2017. Avec en prime l'ITW radio que les deux artistes m'avaient accordée.

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Une femme marche.
Derrière elle, surgit un cycliste qui lui met une claque sur les fesses. Une agression sexiste. Parce qu'elle est une femme.
Elle s'écroule sur la chaussée.

Des hommes approchent. Elle ne veut pas de leur aide. Pour elle, ce sont d'autres menaces, d'autres dangers potentiels.
 

Voici le point de départ de cette histoire d'une femme. (Il s'agit d'un fait divers auquel a vraiment assisté Pierre Notte, l'auteur et le metteur en scène de la pièce.)


C'est Muriel Gaudin qui la raconte cette histoire, qui l'interprète, qui la vit, seule en scène.


Une histoire bouleversante.

Une chronique des « sexismes ordinaires », volontaires, assumés, ou bien « involontaires ».
Et ce sont peut-être les pires, ces sexismes « involontaires », ceux qui arrivent par plaisanterie, par habitude, ou par méconnaissance totale des enjeux sociétaux.


Muriel Gaudin interprète donc cette femme, mais pas que.
Elle va également incarner une trentaine d'hommes différents, auxquels elle a eu, a, ou aura à faire.


Dans un flux de paroles quasiment ininterrompu, dans un débit ultra-rapide, saccadé, âpre, elle parle.
Elle raconte ces hommes qui assument cette oppression d'un sexe sur l'autre, il faut appeler un chat un chat, ou ceux qui ne se rendent pas compte.

Un buraliste, un père, un DRH, un clodo, un professeur, des collègues, un psychiatre, des clients d'un club gay de rencontres rapides et sans lendemain, et bien d'autres.

Elle raconte également ceux qui dans le métro se frottent aux femmes, se permettent des allusions plus ou moins marquées, les salauds aux gestes et aux paroles plus que déplacées.


Tous à leur manière, à des degrés divers, vont incarner ce que Pierre Bourdieu définissait comme « la domination masculine ».


La comédienne est véritablement prodigieuse.
Durant une heure et dix minutes, elle EST purement et simplement cette femme dont on ne connaîtra pas le nom. Cette femme qui pourrait être n'importe quelle femme.


Dans une gestuelle tendue, en totale adéquation avec le logorrhée verbale, elle ne nous lâche pas.


C'est un combat auquel nous assistons.
Elle bougera peu.
Pour autant, elle se débat, elle lutte.

Ses bras, ses mains la matérialisent cette lutte, un peu comme ces combattants rompus aux arts martiaux.


On comprend très vite que le personnage refuse toute relation avec les hommes, et leur dira souvent de se taire. Mais pour autant, elle veut néanmoins vivre, désirer, aimer.


Une chaise. Un guéridon. C'est tout. Besoin de rien d'autre.
A part deux accessoires importants.


Une bouteille d'eau que Muriel Gaudin ne lâchera pas durant pratiquement tout le spectacle. Elle la brandira, parfois comme une arme, parfois comme un étendard.
Dans l'autre main, un verre.
De temps en temps, elle se verse à boire, le goulot pénétrant le verre.
La symbolique est ici évidente. Pas besoin de grand dessin : oui, ces accessoires matérialisent la domination masculine.


Nous assistons à une véritable catharsis qui sera portée à son paroxysme au fur et à mesure du déroulement de la pièce, avec une fin explosive.


Pierre Notte, servi au mieux par une comédienne épatante, nous livre une nouvelle fois un texte important.
Un texte qui interroge notre monde, et nous interroge, surtout nous, les spectateurs masculins.
Impossible de ne pas se questionner, au cours de cette pièce, sur son vécu et son positionnement sur le sujet abordé.


Un conseil : il faut ABSOLUMENT arriver au Poche-Montparnasse un quart d'heure avant le début de la pièce, dès l'ouverture des portes.
Dans un prologue pédagogique et jubilatoire, Muriel Gaudin interpelle le public, avant que la pièce ne commence, sur un ton qui tranche totalement avec ce qui suivra.


C'est une idée formidable et un moment très fort, à ne surtout pas rater.
Et non, je ne vous en dirai pas plus !

Il est des histoires qu'il est nécessaire de raconter.
"L'histoire d'une femme" fait partie de celles-ci.

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