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The scarlet letter

© Photo Y.P. -

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Lettre ou ne pas lettre ?
"La lettre écarlate", c'est un roman de Nathaniel Hauwthorne, publié en 1850.
L'auteure et metteure en scène espagnole Angelica Liddel s'est emparée de cette œuvre pour montrer ce qui entrave, muselle, atrophie, étouffe notre société.


Autrefois, nous dit-elle dans sa note d'intention, c'était la religion qui censurait, rejetait. Maintenant, c'est autre chose... (Il y aurait évidemment beaucoup à dire sur la place et le rôle en matière de religion aujourd'hui... Ceci est un autre débat...)


La Señorita Liddel va nous démontrer que de nos jours, c'est « l'empire de la raison qui domine la pensée puritaine de notre monde ».


Aujourd'hui, nous voulons du Sade sans Sade, du Nietzsche sans Nietzsche, nous voulons du light, de l'édulcoré, du Artaud sans Artaud, du Baudelaire sans Baudelaire. C'est ce que nous pourrons lire sur le rideau rouge du fond de scène grâce à la projection des surtitrages et de certains textes en Français.

 

Aujourd'hui, la morale règne insidieusement en maîtresse, jamais frontalement, dans un message quasi subliminal, sous couvert d'une pseudo-libération des mœurs et des images qui n'est qu'illusion.


Elle va également nous rappeler que l'humanité trouve son fondement (nous verrons que « fondement » est un terme particulièrement approprié...) dans la culpabilité du premier homme, du premier couple, du premier crime...
Nous le verrons, ce premier couple, se recueillir sur la tombe de Hauwthorne. Et puis il y aura le couple Arthur et Hester... Le couple actuel.


Elle arrivera, Hester, en la personne de la metteure en scène-comédienne, en robe à crinoline noire, telle une sombre ménine. Elle sera rejointe par huit pénitents en capes et toques pointues noires.


Ils se dévêtiront et deviendront une nouvelle humanité qui va se livrer à ce que Melle Liddel appelle « les stigmates de la morale et de nos mauvaises consciences ».
Les comédiens dans le plus simple appareil se livrent à des chorégraphies impudiques, soulevant et faisant tournoyer des tables, faisant virevolter leur sexe, se logeant des bouquets de fleurs entre les cuisses, et j'en passe... Nous n'ignorerons plus rien par exemple de leur sillon inter-fessier...


Et puis viennent quelques scènes relatives à la sexualité, avec des scènes plus ou moins simulées.
J'ai compris le propos de l'auteure en constatant que c'était les plus jeunes spectateurs autour de moi qui étaient les plus « choqués ». Je me souviens, vu mon grand âge, dans les années 80, de certaines scènes sur des plateaux de théâtre ayant pignon sur rue, des scènes beaucoup mais beaucoup plus osées.


Que s'est-il passé en presque quarante ans pour que les jeunes gens soient choqués de scènes somme toute pas si terribles que ça ?
Je crois que c'est une partie de la question que nous pose fort justement Angelica Liddel, que de s'interroger sur ce recul.


Avec également le recul de l'image de la femme et de la condition féminine.
La comédienne va interpréter pendant dix bonnes minutes une litanie d'horreurs, de lieux communs sur les femmes et leurs supposées turpitudes. C'est évidemment à prendre au second degré, et ceci déclenche l'hilarité du public.


Ces deux heures ont une vraie beauté formelle, avec des images à couper le souffle, le tout dans des tentures rouge écarlate. (Forcément...)


Les comédiens se livrent totalement et donnent vraiment de leur personne...
Il règne une sorte d'électricité dans l'air, à la fois sur le plateau et dans les rangs des spectateurs. (Certains sont partis avant la fin de la représentation.)


L'interprétation d'Angelica Liddel est magnifique. Elle passe des chuchotements aux cris, elle peut hurler, rouler sauvagement les « r ». Elle aussi donne de sa personne ! Je vous laisse découvrir.
Quelle énergie ! C'est une sacrée performance d'actrice, largement saluée aux applaudissements.

Le message de ces deux heures est on ne peut plus salutaire, et doit être constamment rappelé, parce qu'il ne faut jamais le perdre de vue : ce sont les artistes qui le mieux peuvent sortir le monde de sa torpeur et de sa bien-pensance.
Oui au droit de choquer, de provoquer, oui au droit à l'offense !
Un spectacle coup de poing, qui peut déranger, mais qui ne laisse personne indifférent.

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