15 Octobre 2017
Voici un spectacle qui commence avant le spectacle.
C'est la metteure en scène Colombe Barsacq en personne, qui remet à chaque spectateur un ballon de baudruche noir.
Ce ballon, une fois gonflé, aura un but bien précis : nous faire ressentir les vibrations de du son, telles que peuvent les ressentir les non-entendants.
Ce spectacle est donc à écouter avec les yeux, comme le propose son sous-titre, mais également avec les mains et tout le corps.
Le rideau s'ouvre.
Sur scène, Mathilde, la chanteuse, est accompagnée à la guitare par Antoine Laudière, ce soir-là.
Mais il ne sont pas seuls.
Maylis Balyan va interpréter véritablement, plutôt que simplement « traduire » en langue des signes française, la LSF, les chansons de Mathilde.
Les deux jeunes femmes vont former un duo inséparable.
La metteure en scène les a rendues totalement complémentaires.
De sa voix tour à tour suave, profonde, douce, puissante, de sa très belle tessiture, Mathilde nous raconte des histoires d'amour, les seules qui vaillent la peine, finalement.
Des histoires légères, ou tendues, tristes, drôles ou graves.
Des petits morceaux de vie, des instantanés du quotidien ordinaire.
Des histoires vécues ?
Pendant qu'elle chante, Maylis Balyan met en geste les mots de Mathilde.
Entre les deux, une vraie et très jolie chorégraphie va s'installer.
Une danse de mots et de gestes se déroule devant nos oreilles et nos yeux, un ballet sonore et visuel.
Les deux sont en totale harmonie.
Je me suis aperçu qu'en suivant les signes de Melle Baylan, je ressentais peut-être davantage les émotions générées par la chanteuse.
C'est une sensation assez étrange et formidable que de se retrouver ainsi confronté au handicap, bien que ne maîtrisant pas du tout la LSF, à part le signe « Bravo ! », les deux mains levées qui tournent.
Il faut évidemment saluer cette initiative de rapprocher sourds et entendants.
Tout le monde s'y retrouve, dans ce spectacle, tout le monde trouve sa place, chacun fait preuve d'empathie envers son prochain.
Ici, la différence s'estompe, voire n'existe plus.
Avec sa guitare Gibson, avec ses effets et son looper, Antoine Laudière accompagne les filles de fort belle manière.
Juste une petite remarque : sonoriser Mathilde avec un micro-cravate ne me semble pas des parti-pris les plus judicieux. Le tissu de son chemisier « gratte » en permanence la petite bonnette, générant ainsi tout plein de petits bruits disgracieux.
Il n'en reste pas moins vrai que tout au long de ce spectacle règne une impression d'harmonie et de délicatesse.
Un sentiment de plénitude, même.
L'un de ces spectacles qui vous redonne confiance dans le genre humain !