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La peur

Hélène Degy - Aliocha Itovich - Ophélie Marsaud - (c) Photo Y.P. -

Hélène Degy - Aliocha Itovich - Ophélie Marsaud - (c) Photo Y.P. -

Elle a peur, Irène !
Elle vit dans la peur et dans la culpabilité !

Elle a trompé Fritz, son avocat de mari, avec son professeur de piano.

La femme de ce dernier s'en est aperçu.
Elle poursuit Irène, la harcèle et la fait chanter.

Voici le point de départ de cette adaptation par Elodie Menant de la nouvelle de Stefan Zweig.
De la remarquable adaptation et de la très belle mise en scène d'Elodie Menant, dois-je préciser !

A l'origine, La peur est une nouvelle et non pas une pièce de théâtre, publiée par Zweig en 1920.
Dans ce texte, en remarquable analyste des tourments psychologiques de ses contemporains, l'auteur va disséquer ces sentiments de peur et de culpabilité qui saisissent cette femme mariée à un avocat.

Ce métier n'est pas anodin.
Un avocat se débat quotidiennement et en permanence lui aussi avec cette cette notion de culpabilité.

Elodie Menant a eu l'excellente idée de transposer l'action dans les années 1950, avec tous les codes rattachés à cette époque : les costumes, le rock n'roll, les rapports mari-épouse, etc, etc...

Au moyen d'une judicieuse scénographie, faite d'éléments mobiles sur roulettes symbolisant tour à tour l'intérieur du couple, le quartier, l'enfermement intérieur d'Irène, elle est parvenue à créer un huis clos très hitchcockien.

Hitchockien également le fait que l'on n'est pas dans ce que le grand réalisateur qualifiait de « whodunit », à savoir une trame narrative cherchant à démasquer un coupable.

Ici, en effet, on est certain de la culpabilité d'Irène.

Ici, ce qui nous intéresse, c'est la façon dont elle va vivre avec cette peur et cette culpabilité.
Jusqu'au coup de théâtre final que je me garderai bien de révéler.

La metteure en scène a su organiser une véritable progression dans l'angoisse de la personnage principale et la détérioration des rapports du couple.
Tout au long de la pièce, grâce à elle, on est vraiment envoûté par le propos de l'auteur.

Il faut dire qu'elle a bénéficié d'une distribution d'une grande qualité.

Hélène Degy interprète tout en subtilité Irène. Elle nous fait totalement croire aux tourments intérieurs de cette femme.
Elle est lumineuse dans sa façon d'incarner quelqu'un en proie à cette peur qui la ronge, qui l'envahit progressivement et qui va pratiquement la détruire.

Aliocha Itovich est quant à lui Fritz, le mari-avocat, très au fait des rouages et des nécessités de son métier.
Il est également excellent dans ce rôle ambigü d'un homme faisant face en permanence au mensonge, à la dissimulation et à la nécessité bien souvent d'obtenir des aveux pour condamner un présumé coupable.
A ce propos, Zweig fait dire au personnage une vraie profession de foi :
« Je préfère un coupable en liberté à un innocent en prison », déclare le mari à sa femme, qui elle, au début de la pièce, dénie cette présomption d'innocence à l'un de ses clients.

Ophélie Marsaud est le troisième personnage, la femme trompée qui va faire chanter Irène.
Elle est froide, glaciale, machiavélique et impitoyable à souhait.

Trois comédiens parfaits, donc, une adaptation qui rend tout à fait justice au grand écrivain qu'était Stefan Zweig, une brillante mise en scène ainsi qu'une intelligente scénographie : voici donc qu'elle était l'épatante avant-dernière soirée théâtrale de cette année 2016.

La peur
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L
Je suis désolée de mettre ma question ici car elle n'a rien à voir avec le post, mais pourriez-vous me dire si vous avez fait une critique de la pièce "L'Effet de Serge" ? Je voudrais la lire. J'apprécie beaucoup votre site.
Répondre
Y
Merci pour votre fidélité à mon site !<br /> Non, je n'ai pas vu cette pièce...<br /> Désolé....